« 193 licenciements par jour » : A Lille, les « privé·es d’emploi » s’organisent.

Il était là, présent, à la fois étranger à la fois bien chez soi, l’éternel camion rouge de l’union départementale CGT du Nord.

Comme dans une quarantaine d’autres villes en France, les syndiqué·es du comité national chômeurs-précaires de la CGT se sont réuni·es ce mercredi matin sur la place de la République à Lille pour dénoncer le nombre important de licenciements en France et « peser » dans la « bataille » pour la sauvegarde de l’assurance-chômage, dont la réforme initialement prévue pour décembre 2024 par l’ex-Premier ministre Gabriel Attal a été suspendue au lendemain du premier tour des dernières élections législatives. Selon la CGT, à partir des calculs de la DARES, environ 193 personnes seraient licenciées chaque jour, ce qui équivaudrait à 20 300 depuis le 1er juillet 2024. Un chiffre important, d’autant qu’en pleine période de serrage de vis budgétaire, de menaces multiples de liquidations judiciaires et de PSE massifs, les mois qui vont suivre risquent de ne pas bien être glorieux en la matière.

Ils et elles n’étaient qu’une petite quinzaine, fraîchement déterminé·es en ce matin sec d’octobre, bien qu’on aurait aimé y voir un peu plus de monde. L’occasion néanmoins de marquer une présence, face aux quelques allées-venues des passant·es au pas pressé, mais surtout, face à la préfecture.

Pascal Blindal, secrétaire à la politique revendicative de l’UD CGT Nord, sait bien ce qu’il en retourne :

« On a gagné une première victoire avec l’arrêt de la réforme de l’assurance-chômage, mais on a pas gagné la guerre, juste une bataille. Tout est renvoyé à des « négociations » entre ce qu’on appelle les « partenaires sociaux » et il faut qu’on arrive à peser là-dessus. On revendique une augmentation des minimas sociaux de l’assurance chômage et l’augmentation des recettes. Par exemple, si on établit l’égalité hommes-femmes sur les salaires, c’est 5 milliards de recettes supplémentaires [grâce aux cotisations patronales du fait des hausses de salaire pour les femmes, ndlr] pour l’assurance-chômage, si on abaisse le temps de travail à 32 heures : 16 milliards. »

« On va vous dire qu’il y a de la création d’emplois. Mais les emplois qui disparaissent en CDI, beaucoup sont remplacés par des emplois en CDD et à temps partiel. »

Les enjeux autour de l’assurance-chômage pose dès lors 2 grandes questions, celles des indemnités, et plus généralement celle dont la société traite ses chômeurs.

Christine*, 55 ans, syndiquée à la CGT, en a récemment fait les frais. Alors qu’elle venait tout juste de trouver un travail après plusieurs mois sans emploi, elle apprend l’été dernier sa radiation de l’institution à la suite d’un contrôle, sous prétexte qu’elle n’aurait pas fait « assez de démarches actives » :

« En fait, je ne gardais pas la totalité de mes démarches parce qu’on m’avait jamais demandé de les garder, jamais demandé de justificatifs précis. Le contrôle s’étant mal passé, j’ai eu le droit à une suspension d’inscription. A partir de là, j’ai fait appel au syndicat [la CGT] qui est intervenu. Ce qui était bête, c’est que dans ce laps de temps, j’avais signé un contrat de travail. J’ai été radiée de France Travail alors que j’avais signé un contrat de travail, précaire mais quand même. Ça, le contrôleur ne voulait pas l’entendre. »

Il aura fallu l’intervention de son syndicat auprès de son agence pour que sa radiation soit annulée. Ses indemnités non payées pendant ce temps ne lui ont cependant pas été remboursées.

« Quand le syndicat a écrit à mon agence, 2 heures plus tard j’avais un coup de fil de mon directeur d’agence, que je ne connaissais ni d’Ève ni d’Adam avant. Heureusement que j’étais syndiquée ! »

« Là, c’est comme si je n’avais jamais été radiée. Je pense que je suis dans la tranche d’âge qui les embête, j’ai 55 ans. C’est une difficulté pour moi de trouver du travail à cause de mon âge. J’ai un doctorat, donc partout on me dit que je suis trop vieille ou que j’ai trop de diplômes. A France Travail, ils savent très bien que c’est difficile, donc ils ne veulent pas me payer pendant des années. J’avais une ASS [allocation de solidarité spécifique, délivrée sous conditions une fois les droits au chômage épuisés, ndlr], donc ils voulaient pas me la payer trop longtemps. »

« J’ai été radiée de France Travail alors que j’avais signé un contrat de travail« .

Si la mobilisation de ce matin n’a pas réuni les foules, la CGT reste confiante, et mobilisée. D’autres actions devraient être prochainement organisées pour faire face aux attaques patronales.

* Le prénom a été modifié

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