Appel à soutien : Financement participatif pour le projet documentaire « Des nimbes au monde »

L’Insurgée a suivi depuis septembre 2024 la lutte pour la sauvegarde du centre culturel de l’Escapade à Hénin-Beaumont. Nous en avons fait un documentaire et nous avons besoin de votre soutien financier pour le terminer.

Synopsis du film

Un piquet de grève, un soir d’automne, à Hénin-Beaumont. Des drapeaux, des chants, une foule sur un bout de trottoir. Derrière, la façade vitrée du centre culturel de l’Escapade, dont l’autonomie est menacée par la municipalité d’extrême-droite.

Alors que le maire Steeve Briois veut municipaliser le centre culturel associatif, les langues se délient. On redécouvre derrière cette décision une chronologie de la brutalité du RN face à son opposition. Une histoire faite de mauvais coups, de diffamation, de mépris, qui vient ternir l’image de « dédiabolisation » voulue par le parti.

Car en face, la lutte qui vient briser le silence apparent du quotidien. Nous filmons l’émergence d’un collectif humain, qui échange et expérimente, uni pour la défense du théâtre populaire. Car à Hénin-Beaumont, a pu se tenir une lutte qui n’aurait pas du avoir lieu. Deux visions de la culture s’affrontent, deux visions de comment faire monde ensemble. Une histoire qui sonne comme un avertissement pour la suite.

Capture d’écran – un bénévole devant le bâtiment de l’escapade, le jour du déménagement.

Nous sommes deux réalisatrices, engagées dans cette démarche pour des raisons à la fois politiques et intimes.

Aurore Froissart : Hénin-Beaumont, c’est ma ville. J’y ai grandi, j’y ai vécu. Et c’est le terrain de jeu pour mes premières expériences audiovisuelles : c’est là que j’ai tourné mes premiers clips, et pris mes premières images. Et c’est là que j’ai vu les choses basculer. Lorsque le RN a pris la mairie, en 2014, j’étais jeune adulte. La montée en puissance du parti d’extrême droite a coïncidé avec ma prise de conscience politique. Ce n’est pas un hasard. J’ai vu les structures de solidarité disparaître peu à peu, les opposant·es se taire, les services publics se vider de leur sens. Mais il y avait aussi, toujours, des gens qui résistaient. Ce film, je le porte pour elles et eux, pour dire que tout n’est pas mort. Que la lutte continue, même en sourdine. L’Escapade a été un lieu de construction pour moi. En le voyant attaqué, j’ai compris qu’il fallait faire quelque chose. Que ce film pouvait être une réponse possible.

Louise Bihan : J’ai grandi à Toulon, une autre ville passée entre les mains du Front National, 20 ans auparavant. J’y ai vu les effets à long terme d’une politique de fermeture, d’une communication agressive, d’un pouvoir qui capte les imaginaires pour mieux vider les lieux de leur force collective. Si je suis venue dans le Nord, ce n’est pas par hasard. J’y ai trouvé une histoire qui me rappelait celle, enfouie, de là où j’avais grandi : une histoire ouvrière et conflictuelle avec elle-même. En tant que journaliste et documentariste, je cherche à donner du sens à toutes ces histoires. Et ici, à Hénin-Beaumont, tout se joue. Le laboratoire politique qu’est devenue cette ville doit être documenté. Le cinéma, pour moi, n’est pas une distance : c’est un outil de terrain, de résistance, de mémoire.

Présentation du projet

Depuis 2014, Hénin-Beaumont, ville ouvrière du pas-de-Calais, est aux mains du Front National / Rassemblement National, et est devenue très vite sa vitrine respectable. Derrière la communication flatteuse de la mairie d’extrême-droite, l’opposition est très souvent contrainte au silence. Avant sa récupération par la mairie, le centre culturel de l’Escapade est un des derniers lieux où la main-mise de la municipalité est limitée. Ce film documentaire veut raconter les derniers instants de son autonomie, mélangeant images tournées pendant la lutte de l’hiver 2024-2025 et témoignages d’acteur·ice·s et d’opposant·e·s.

Une grève improbable, un sursaut politique

Devant l’Escapade, les salarié·es et les habitant·es défendent ce qu’il reste d’un lieu emblématique de la culture populaire. En apparence, c’est une mobilisation modeste. En réalité, elle est inouïe. Car à Hénin-Beaumont, depuis l’arrivée du Rassemblement National à la mairie, toute parole dissidente est devenue rare. Visible, elle est souvent étouffée. Cette grève, nous y avons vu une faille dans l’ordre imposé. Un espace où la lutte pouvait de nouveau exister. Un moment fragile, précieux, à documenter. De là est né Des nimbes au monde.

Des parcours personnels ancrés dans la lutte

Nous sommes deux réalisatrices, engagées dans cette démarche pour des raisons à la fois politiques et intimes.

Nous avons filmé cette grève comme elle s’est présentée : avec ses creux, ses espoirs, ses tensions. Rien n’était planifié. Tout était organique. C’est cette spontanéité, cette vérité du geste collectif, que nous avons voulu capter. Non pas pour faire un film institutionnel ou explicatif, mais pour saisir ce que veut dire résister ici et maintenant, dans une ville que les médias ne montrent qu’à travers le prisme de l’extrême-droite ou de la désespérance sociale.

Hégémonie municipale et silences contraints

À travers l’histoire de l’Escapade, c’est tout un système politique que nous explorons. À Hénin-Beaumont, depuis dix ans, l’opposition a été réduite à peau de chagrin. Les structures associatives ont été désossées, les conseils municipaux vidés de leur sens et transformés en foire d’empoigne, les salarié·es précarisé·es ou remplacé·es. Le pouvoir s’exerce avec une efficacité redoutable, mêlant séduction populiste, communication omniprésente et contrôle des récits. Ce que nous avons voulu capter, c’est l’impact réel de cette hégémonie : le climat de peur, le repli sur soi, le silence imposé. Mais aussi les failles, les refus, les gestes minuscules qui tiennent tête.

Un cinéma du commun

Notre démarche est clairement située. Ce film est antifasciste. Il ne prétend pas à une neutralité froide, mais s’inscrit dans une tradition de cinéma engagé, qui croit à la force des récits collectifs, à l’importance des luttes locales. C’est un film qui prend position : pour la culture comme bien commun, pour les services publics, pour les espaces de création et de débat, pour celles et ceux qui refusent l’apathie. 

Ce n’est pas un film nostalgique. Ce n’est pas non plus un film de dénonciation sèche. C’est un film de lien. Il raconte la manière dont un théâtre peut être bien plus qu’un lieu de spectacles : un lieu de rencontre, d’émancipation, de vie. Il donne à entendre les paroles d’artistes, d’animateur·ices, de militant·es, de syndicalistes, de simples habitant·es. Il fait émerger une mémoire collective, en train de se reformer, contre l’effacement. 

Le titre, Des nimbes au monde, renvoie à cette impression d’évanescence, de flottement, de ville suspendue dans une quiétude factice. Mais aussi à l’élan vital, au retour du politique, à la sortie de l’invisibilité. A la résistance matérielle des êtres et des choses que cette machine écrase. À la possibilité, même ténue, de faire monde ensemble.

La dernière Réunion Publique avant le déménagement de l’Escapade

Un film-outil, un film-compagnon

Nous ne voulons pas faire un film « sur » Hénin-Beaumont, mais un film avec celles et ceux qui y vivent. Un film de compagnonnage. Un film qui puisse circuler dans les lieux de lutte, dans les médiathèques, dans les écoles, dans les collectifs. Un film qui donne du courage. Qui permette d’ouvrir des discussions. Qui sert à celles et ceux qui, ailleurs, se battent contre les mêmes dynamiques d’accaparement du pouvoir et de destruction du lien. 

Ce film est un outil. Il est aussi un hommage. À une ville qu’on refuse de laisser sombrer. À des personnes qui, malgré tout, malgré l’isolement, malgré la fatigue, continuent à dire non. 

Où en est-on ?

Le tournage du film est presque terminé. Il reste les derniers entretiens à capter, ainsi que des images d’ambiance. Le plus gros du travail va résider dans la post-production du film (montage, étalonnage, mixage son) et dans sa diffusion (financement des projections-tests et de l’avant-première, communication, distribution).

Nous prévoyons la sortie du film pour fin Novembre 2025, afin d’en faire un outil de sensibilisation au moment des élections municipales. Nous espérons obtenir le soutien de Pictanovo dans le cadre du fonds Emergence, un fonds à destination de premières créations portées par des acteurs du monde associatif. Pour compléter ce fonds, nous espérons obtenir 6900 euros via ce financement participatif.

  • 4 000 euros pour la production et la post-production (payer les technicien.ne.s)
  • 1 000 euros pour la diffusion (impressions, inscriptions, transports, DVD…)
  • 220 euros pour les défraiements (transports, nourriture, hébergement…)
  • 415 euros pour les moyens techniques (matériel, disque dur, logiciels…)
  • 1265 euros pour les frais de production (divers)

On a besoin de vous, n’hésitez pas à faire des dons pour notre financement participatif !